Naomi Klein : « Les gens veulent qu’on leur montre un futur où le monde ne s’effondre pas »

Interview de Naomi Klein par Isabelle Hanne 17 Octobre 2019

Vingt ans après son best-seller anticapitaliste « No Logo », la journaliste canado-américaine publie « On Fire », plaidoyer pour une révolution à la fois écologique et sociale. Face aux « flammes du changement climatique et aux flammes des mouvements d’extrême droite » qui consument la planète, l’essayiste de 49 ans défend le Green New Deal de la gauche américaine, et se dit ragaillardie par l’activisme de la nouvelle génération.

Son premier livre paru il y a vingt ans, No Logo, dénonçait les ateliers de la misère, la « tyrannie des marques », l’idéologie néo­libérale et la cupidité des multinationales manufacturières, aux méthodes de fabrication aux antipodes de leur marketing pseudo progressiste. Un ouvrage clé à l’aube du XXIe siècle, traduit dans 28 langues, dont la pertinence a marqué des générations d’intellectuels, de militants et d’artistes. La journaliste, essayiste et réalisatrice altermondialiste canado-américaine Naomi Klein, 49 ans, a publié en septembre aux Etats-Unis son septième livre, On Fire (Plan B pour la planète : le New Deal vert, le 6 novembre en France, chez Actes Sud). Un état des lieux de l’urgence climatique et de l’activisme pour tenter d’y faire face, ainsi qu’un plaidoyer en faveur d’un Green New Deal (GND), à l’instar de celui porté par la députée américaine Alexandria Ocasio-Cortez (« AOC »). Un vaste plan d’investissement dans les énergies renouvelables visant à endiguer le réchauffement climatique tout en promouvant la justice sociale. Le soutien à ce plan, inspiré du New Deal de Roosevelt qui avait sorti les Etats-Unis de la Grande Dépression, est devenu un critère déterminant pour l’aile progressiste du Parti démocrate américain, en pleine campagne pour les primaires avant l’élection présidentielle de 2020.

Sacrée « personnalité la plus visible et la plus influente de la gauche américaine » en 2008 par le New Yorker, Klein construit depuis deux décennies des passerelles entre les sphères académiques, militantes et médiatiques. Elle a dénoncé le « capitalisme du désastre » (la Stratégie du choc, 2007) et les vautours de la privatisation, en embuscade après la guerre en Irak ou l’ouragan Katrina à La Nouvelle-Orléans. Dans son dernier livre, elle analyse le « dialogue mortel entre les tendances planétaires et politiques », du réchauffement aux montées des droites extrêmes. Fait des parallèles entre le suprémacisme blanc, la violence armée et la destruction de l’environnement. Mais assure que l’activisme de la jeunesse (le Sunrise Movement, les climate strikes), les nouvelles figures politiques et militantes (AOC, Greta Thunberg), ainsi que l’élaboration de programmes politiques très ambitieux comme le Green New Deal, lui ...